dimanche 1 mars 2020

L'instant de vérité

Lundi 1er mars 2021




Pendant longtemps, je ne notais que les rêves
qui me frappaient le plus, et encore, pas tous.
Même une fois notés avec grand soin, la plupart de ces rêves
 restaient pour moi totalement énigmatiques.
Avaient-ils seulement un sens ? 
Je ne me serais pas avancé à me prononcer à ce sujet. 
Certains, surtout parmi ceux que je ne notais pas, 
ressemblaient plus à une histoire de fous
qu'à un message porteur de sens !

C'est en août 1982, six ans après mon premier travail sur un rêve, 
qu'a eu lieu un grand tournant dans ma relation aux rêves et au Rêveur. 
A ce moment, j'ai compris que tout rêve était porteur d'un sens, 
caché souvent (à dessein, sûrement) sous des dehors déroutants 
-que tous sortent de la même Main. 

Que chacun, si anodin ou si scabreux qu'il puisse paraître, 
ou si loufoque ou foireux, ou si fragmentaire ou fumeux...
que chacun, sans exception est une parole vivante du Rêveur ; 
une parole souvent espiègle, ou un fou-rire derrière des airs graves voire lugubres
 (il n'y a que lui pour faire saisir au vol et faire éclater le comique ou le cocasse,
 même là où on s'y attend le moins...);
parole drue ou parole truculente, jamais banale, toujours pertinente,
toujours instructive, et bienfaisante 
- création, en un mot, sortie toute chaude des mains du Créateur !
Une chose unique, différente de toutes celles qui furent ou qui seront jamais créées, 
et créée là sous tes yeux et avec ton involontaire concours, 
sans tambour ni trompette et (semblerait-il) à ta seule intention. 

Un don princier, oui, et un don à l'état pur, entièrement gratuit. 
Sans charge pour toi de gratitude, ni même d'en prendre note seulement, 
de la gratifier même d'un regard. 
Incroyable, et pourtant vrai !

Ce qui est vrai, en tout cas, c'est que parmi la multitude de rêves 
que j'ai notés tout au long des dix années écoulées 
(il doit y en avoir pas loin d'un millier, dont bien trois ou quatre cents 
dont j'ai pu saisir le message), 
il n'en est pas un seul qui à présent me donne l'impression
de faire exception à la règle ; 
d'être, non pas une création, mais le produit 
de quelque mécanique psychique plus ou moins aveugle,
 ou de quelque force  à la recherche d'une gratification, 
que ce soit celle des sens, ou celle de la vanité.
 Dans tous, sans exception, à travers toute leur prodigieuse diversité, 
je sens la même "griffe", j'y perçois le même souffle. 
Ce souffle-là n'a rien de mécanique, et il ne vient pas de moi.


Le rêve messager -ou l'instant de vérité

Mais, dans les premières années, je ne me posais aucune telle question. 
Je ne prêtais aucune attention aux rêves qui, à ce moment, 
m'apparaissaient encore comme du "tout-venant". 
Et même parmi ceux que je notais, je ne m'attardais guère que sur les rêves 
que j'appelais alors les "rêves messagers". 
C'étaient, en somme, ceux pour lesquels il était clair, d'emblée, 
par je ne sais quelle prescience obscure, 
qu'ils étaient bel et bien porteurs d'un "message".

Maintenant que je sais que tout rêve porte un message, 
et qu'il arrive que des rêves d'humble apparence
expriment un message de grande portée,
 ce nom de "rêve messager" m'apparaît ambigu, 
et j'ai quelque réticence à l'utiliser encore.

 Ce sont aussi les rêves, qui, d'emblée, se signalent à l'attention 
comme des "grands rêves". 

"Grands", non pas forcément, par leur longueur ou leur durée, 
ou par leur richesse en épisodes ou en détails marquants ; 
mais dans le sens ou parfois telle oeuvre de la main ou de l'esprit-tableau, 
roman, film, voire un destin - nous frappent comme une chose "grande". 
Un des signes d'un tel rêve,
c'est une acuité exceptionnelle des perceptions et des pensées, 
et parfois une force bouleversante des émotions.

Comme si le Rêveur voulait bousculer notre inertie invétérée, 
nous secouer, nous crier à tue-tête : 
"Eh espèce d'endormi, réveille-toi pour une fois 
et fais attention à ce que je suis en train de te dire !"

Ce sont aussi les rêves au langage transparent, sans "code" secret
 ni jeux de mots d'aucune sorte, sans rien qui cache ou qui voile. 
Le message y apparaît avec une clarté fulgurante, indélébile, 
tracé dans la chair même de ton âme par une Main invisible et puissante, 
toi-même lettre vivante et vibrant acteur de la Parole à toi adressée. 

Et chaque mot porte, qui s'accomplit en toi
pour exprimer par les mouvements de ton âme 
un sens qui te concerne, toi et nul autre,
le poser dans ta main afin que tu t'en saisisses.
 Celui qui parle en ton coeur comme personne ne pourrait te parler. 
Il te connaît infiniment mieux et plus intimement
que tu ne te connais toi-même. 
Quand le temps est venu, mieux que personne,
il sait quels sont les Mots vivants 
qui trouveront en toi résonances profondes 
et quelles sont les cordes secrètes qu'elles feront vibrer.

En bref, le "rêve messager" est celui où le Rêveur "met le paquet" 
pour te dire ce qu'il a à te dire, avec une force et une clarté exceptionnelles. 
S'il y met une telle insistance, c'est, à coup sûr, que le message est lui aussi exceptionnel, 
qu'il te dit une chose essentielle, une chose qu'il faut absolument que tu saches. 

Peut-être le rêve vient-il te révéler des ressources insoupçonnées enfouies en ton être 
- une force intrépide qui s'ignore encore, ou une profondeur vacante, 
ou une vocation qui t'attend, un destin à accomplir...- 
quelque chose à quoi jamais tu n'aurais osé rêver à l'état de veille ! 
Ou peut-être est-il venu pour t'encourager à te séparer de quelque poids écrasant 
que tu traînes depuis de longues années, pendant ta vie entière peut-être...

Ecouter un tel rêve, entendre son message évident, irrécusable, 
et accueillir la connaissance qu'il te porte, accepter cette vérité qui t'est offerte - 
c'est aussi voir ta vie changer profondément, dans l'instant même. 
C'est changer, c'est te renouveler, en cet instant.

Plus jamais tu ne seras celui que tu étais avant l'instant de vérité.



Alexander Grothendieck

mardi 7 janvier 2020

Citations de Jung (2)

Mardi 7 janvier 2020

 
 
A la question qui m’a été mille fois adressée :
« Que puis-je faire ? » je ne connais d’autre réponse que :
« Deviens celui que tu as été depuis toujours ! ».

C’est-à-dire, efforce-toi d’atteindre à cette totalité,
à cet épanouissement de toi-même
que nous font perdre les circonstances d’une existence consciente et civilisée,
à cette totalité que chacun porte potentiellement en lui-même à son insu.
.


Le sens de mon existence est que la vie me pose une question.
Ou inversement, je suis moi-même une question posée au monde
et je dois fournir ma réponse,
sinon j’en suis réduit à la réponse
que me donnera le monde. 
.

C.G. Jung






Croyez-moi :
Ce n'est pas une doctrine, pas un enseignement que je vous donne.
D'où tirerais-je le droit de vous donner des leçons ?
Je vous révèle le chemin de cet être humain,
son chemin mais pas votre chemin.
Mon chemin n'est pas votre chemin ;
je ne peux donc pas vous instruire.
Le chemin est en nous, mais pas dans les dieux,
 ni dans les doctrines ni dans les lois.
C'est en nous qu'est le chemin, la vérité et la vie.

Malheur à ceux qui vivent selon des modèles !
La vie n'est pas avec eux.

Si vous vivez selon un modèle, vous vivez la vie d'un modèle,
mais qui vivra votre vie sinon vous-mêmes ?
Donc vivez-vous vous-même.

Les panneaux indicateurs sont tombés,
des sentiers incertains se déroulent devant nous.
Ne soyez pas avides d'avaler les fruits qui se trouvent dans le champ des autres.
Ne savez-vous pas que vous êtes vous-mêmes le champ fertile
qui porte tout ce qui vous est utile ?
Mais qui le sait aujourd'hui ?

Qui connaît le chemin qui mène aux champs éternellement fertiles de l'âme ?
Vous cherchez le chemin par le biais d'éléments extérieurs ;
vous lisez des livres et écoutez des avis : à quoi bon ?

Il n'y a qu'un seul chemin et c'est votre chemin.
Vous cherchez le chemin ?
Je vous mets en garde contre mon chemin.
 Il peut être pour vous le mauvais chemin.
Que chacun suive son propre chemin.
.

C.G. Jung
Livre rouge
(p. 147)  
.



mercredi 1 janvier 2020

Citations de Jung (1)

Mercredi 1er janvier 2020

 
 
 
Pour bien commencer 2020,
 quelques citations de Jung : 




L'humanité souffre 
d'une immense carence introspective.

 On parle de l'enfant,
alors qu'on devrait entendre 
l'enfant en l'adulte.
Car il y a dans l'adulte un enfant,
un enfant éternel toujours en état de devenir,
jamais terminé,
qui aurait besoin constamment
de soins, d'attention et d'éducation.
.

La chose la plus terrifiante, 
c'est de s'accepter soi-même.
.

Nourrir ceux qui ont faim, 
pardonner à ceux qui m'insultent
et aimer mon ennemi,
voilà de nobles vertus.
Mais que se passerait-il
si je découvrais
que le plus démuni des mendiants
et que le plus impudent des offenseurs
vivent en moi, 
et que j'ai grand besoin 
de faire preuve de bonté à mon égard, 
que je suis moi-même l'ennemi 
qui a besoin d'être aimé ?
Que se passerait-il alors ?

.
C.G. Jung

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