jeudi 21 avril 2016

Le symbole de l'arbre dans les rêves

Mercredi 20 avril 2016

Nul arbre noble et de haute futaie 
n'a jamais renoncé à ses racines obscures, 
car il pousse non seulement vers le haut, 
mais aussi vers le bas.
C.G. Jung


L'arbre exprime la Vie.
Cette affirmation fait entrevoir la richesse du symbole !
 La traduction la plus classique voit dans l'arbre
 un organisme vivant qui s'ancre en la terre
dans laquelle il puise sa substance par ses racines
 et qui se déploie dans l'air, dans le ciel
 d'où il reçoit les rayonnements indispensables à sa croissance
.
Une image exprimant avec une telle clarté
La relation vivante à la terre et au ciel
qui se développe à proportion vers le bas et le haut,
 symbolise naturellement la loi psychologique qui exige de l'homme
 qu'il maintienne un équilibre entre ce qu'il est convenu d'appeler
 les forces chtoniennes et les puissances ouraniennes,
entre l'instinctualité et la spiritualité.

Cette interprétation est tellement répandue, si judicieuse aussi,  
elle s'impose avec une évidence si totale à l'analyste, 
qu'elle emplit son champ de vision  
et peut masquer des sens plus subtils peut-être,  
mais d'importance au moins égale.
C'est l'étude du palmier, du chêne
et celle de l'arbre immense
qui contribuent de la façon la plus décisive
à l'élucidation du symbolisme de l'arbre,
tel qu'il se dégage des rêves pris en référence.
L'arbre, c'est la vie,
 la croissance, l'évolution.

Mais plus encore peut-être que la vie, c'est la succession des vies.
La succession ! Faut-il rappeler que le mot succès,
que l'usage a chargé du sens de réussite, était autrefois le terme désignant
 ce qui allait se développer à partir du bourgeon terminal
d'un jeune arbre nouvellement transplanté ?
Ce développement, témoin de la réussite de la plantation,
 est à l'origine du sens actuel du mot.

 

L'arbre est d'essence féminine.

Innombrables sont les rêves dans lesquels la femme s'identifie à l'arbre
et même devient un arbre qui s'enracine et déploie son feuillage.
Une psychologie féminine, devant une image d'arbre,
se sent tout-de-suite participant au flux de la sève.
Devant une fleur ou un arbre, la rêveuse éprouve immédiatement le désir
 de se laisser glisser dans la tige ou dans le tronc,
de descendre dans les racines, de se charger de la substance puisée dans l'humus
 et de remonter, pleine de vie, jusqu'à renaître d'une corolle.
La femme et l'arbre ont en commun l'acte sacré qui assure,
depuis le fond des temps, la chaîne de la vie :
l'acte de porter fruit.
Une femme qui rêve l'arbre ne connaît plus la solitude.
 Elle n'est plus un individu qui rêve
 mais une vocation éternelle qui tend à son accomplissement.


C'est dire que si l'arbre est femme, vie, genèse, il est mère.
 [...]
Quand la rêveuse s'identifie à l'arbre, le rêveur, lui,
 projette sur le végétal soit l'image de la mère,
 soit la puissance mystérieuse de son anima.[...
]
A proximité de l'arbre immense, les petits personnages,
gnomes, lutins, nains et farfadets, représentent les esprits de la terre,
 les ancêtres disparus. Ils sont du monde des racines !
 Les nains du rêve, dans presque toutes les situations,
expriment des forces secourables.
 Ils sont, en réalité, la personnification des innombrables potentialités de la psyché,
 hérités de la longue aventure phylogénétique.
Autour de l'arbre, dans l'arbre, ils s'apparentent aux écureuils,
 aux petits singes et même aux oiseaux,
 symboles des insaisissables ressources psychologiques.
Les oiseaux sont du ciel (...)
 Il faut être en harmonie avec l'ensemble des disparus
 pour devenir ce qu'ils nous ont transmis.
[...]
La psychologie en harmonie avec ses racines ne connaît plus de limite :
 elle se sent apte à produire toutes les fleurs, tous les fruits,
 elle accueillera tous les oiseaux.
 [...]
 L'eau renvoie à l'anima, à l'essence féminine de l'arbre,
 aux forces qu'une âme individuelle reçoit de l'âme universelle.


Dans tous les cas, l'arbre exprimera une forme de relation du rêveur
 à son ascendance, directe ou plus lointaine.[...] 
L'arbre immense attire l'attention sur la pesanteur d'images ancestrales
qui se refusent à l'intégration dans une globalité homogène et positive.
 [...]
 A l'heure de la traduction, on se rappellera que l'arbre
reste un magnifique symbole
d' union entre le ciel et la terre.
.
Georges Romey
"Dictionnaire de la Symbolique"
.

P-S : Quand il s'agit d'un très grand arbre,
cette image peut aussi évoquer le Soi.




lundi 11 avril 2016

Marie-Laure COLONNA - Les Racines du Ciel


Emission radio du 10 avril 2016
"Faire émerger sa personnalité profonde"



Extrait de l'émission :

...C'est comme la croissance d'un arbre :
Si vous voulez  étendre des branches à l'infini vers le ciel
et que vous n'avez pas poussé des racines dans la terre,
ça va s'écrouler comme un baobab
à la première poussée du vent.

C'est un chemin qui demande qu'on pénètre
dans la profondeur du sol, de la matière, des instincts,
tout autant qu'on va pénétrer dans d'autres domaines plus subtils.

D'où l'idée que le processus d'individuation ne consiste pas uniquement
à contacter l'esprit, l'âme ou la dimension plus subtile de notre être,
mais qu'il est un travail à la fois spirituel et érotique,
faisant intervenir à la fois l'âme, le corps et l'esprit...

Marie-Laure Colonna



Tantôt intelligence active et pénétrante, yang, logos fécondant,
tantôt intelligence réceptrice, yin, sagesse des profondeurs,
tantôt encore érotique intense,
dévoilée dans les rêves dans des images d’union,
la créativité de l’âme, de Psyché,
naît dans le mariage de l’amour et de l’esprit.


Dans "Les facettes de l'âme" (Editions du Dauphin),
 notre invitée, Marie-Laure Colonna, philosophe et psychanalyse jungienne,
démontre que cette créativité de l’âme intervient dans l’accomplissement de la guérison
– l’on vient en analyse parce que l’on souffre –
 et parce que le contact avec l’inconscient va permettre de déchiffrer ses symptômes
et de trouver de nouvelles pistes pour relancer sa vitalité.
Mais aussi et surtout dans le sens d’évolution de la personnalité
nommé par Jung : processus d’individuation.

Strate après strate, cette dynamique d’intégration des opposés confronte,
réunit et marie la personnalité consciente en transformation,
à des plans de plus en plus éloignés de l’inconscient personnel et de l’inconscient collectif,
jusqu’à produire le sentiment d’une union sous-jacente avec la nature entière.
.



vendredi 8 avril 2016

Grand rêve : Le rêve de Tolède

Vendredi 8 avril 2016


"Seul l'enfant sans malice, l'homme sans méfiance
peut oser ne pas s'effrayer de la présence d'un serpent,
tous les autres humains en ressentent une profonde terreur.
C'est là un des secrets de l'enfance qui s'évanouit avec elle."
.
 C. G. Jung
"L'homme à la découverte de son âme"
.



Sous la cathédrale de Tolède se trouve une citerne pleine d'eau 
en relation souterraine avec le Tage. 
Cette citerne est une petite chambre obscure. 
Dans l'eau  se trouve un très gros serpent dont les yeux brillent 
comme des pierres précieuses. 
Près de lui une épée et un poignard. 
Ce poignard est la clé de Tolède et il confère à son détenteur 
la suzeraineté sur la ville. 
Le serpent - je le savais - était l'ami et le protecteur d'un certain Monsieur B.C. 
Celui-ci était tout d'abord avec moi dans la chambre obscure 
et mettait son pied dans la gueule du serpent 
qui le lui léchait de la façon la plus amicale, 
tous deux y prenant du plaisir 
(...)
.


Puis, le rêveur s'entretient avec le serpent, 
qui lui demande de lui rendre l'enfant ( - son ami). 
C.Jung examine ensuite longuement le contexte de cet énoncé,
 ce grand rêve dont les Primitifs ont l'intuition 
que leur signification intéresse tout le groupe social : 
le serpent - assimilé ici au dragon des légendes du monde entier, 
y  incarne le psychisme obscur, l'inconscient, le monstrueux, 
capable de se dresser en nous et de nous rendre mortellement malades.

Nous rencontrons là (...) une représentation primitive et originelle : 
les sorciers africains passent aux yeux de leur tribu pour être accompagnés de démons, 
ayant forme de reptile, et l'âme passe alors pour être un serpent (...) 
C'est parce que le serpent défend l'accès à la totalité de l'être (...) 
qu'il faut descendre jusqu'à lui (...) 
l'instinct profond en nous aspire à retrouver l'enfant.(...) 
Cette descente dans l'antre du serpent, qui figure un problème ancestral, 
est, aussi, une reviviscence d'un patrimoine culturel ancestral (...)

Notre rêve est donc comme la remémoration d'antiques mystères d'initiation
Après avoir établi le rapport entre ces contenus, et le poids d'une culture chrétienne, 
qui se serait bâtie, telle la cathédrale, sur la crypte d'un paganisme trop bien caché.

C.G.Jung conclut :
L'amitié que le rêveur avait pour ce monsieur B.C., 
qui savait commercer avec le serpent, 
aurait dû lui indiquer quelle attitude il fallait faire sienne
 pour aborder le dragon avec profit.

Quel secret gardait ce dernier ? 
A quoi l'Eglise chrétienne s'était-elle donc fermée? (...)
C'est le secret terrestre de l'âme inférieure et de l'homme naturel 
qui ne vit pas de façon purement cérébrale, 
mais chez qui la moelle épinière et le sympathique 
ont encore leur mot à dire.
.
C.G. Jung
"L'homme à la découverte de son âme"
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