jeudi 17 septembre 2015

Grand rêve : Le chemin initiatique

Jeudi 17 septembre 2015


Voici le rêve d'un "contemporain"
qui illustre bien, je trouve,
cette "descente initiatique dans l'abîme"
suivie d'une "élévation dans la lumière" :


Au creux d'une région de montagnes sauvages, 
je découvre un porche de temple creusé dans la roche.
Un porche antique et majestueux qui rappelle tout à la fois 
les styles moghols, indien et byzantin 
et dont l'ogive centrale est comme un croissant de lune 
qui s'encastre sous terre.

Je le franchis, j'entre et je m'enfonce
dans des salles majestueuses 
aux lourds piliers foisonnants de sculptures multiformes.
 J'avance tout droit et la lumière diminue
tandis que l'espace se resserre.
 Je découvre des corridors à trois voies 
qui se succèdent devant mes pas.

Je vais tout droit dans le premier et le second 
sans tourner ni à droite ni à gauche puis je choisis d'aller à droite 
dans la bifurcation plus resserrée qui m'apparaît ensuite.
Bientôt je baisse la tête car le couloir se rétrécit en un boyau de terre 
qui m'enserre bientôt comme une gangue ductile et collante 
comme faite d'un épais caoutchouc noir 
qui épouse la forme de mon corps et l'épouse tout entier.

 J'ai l'impression d'être digéré dans les entrailles de la Terre.
 Il me faut avancer de toute façon car il m'est impossible 
de revenir en arrière et je dois ramper de toutes mes forces réunies
 pour avancer en perdant tout sens de l'orientation 
sous peine d'être emmuré vivant et à jamais...

Après beaucoup d'efforts dont le temps s'effiloche
en même temps  que l'espace s'est refermé sur moi
dans un noir absolu, 
je débouche subitement
dans un toboggan en marbre très glissant 
qui m'aspire immédiatement. 
Je suis emporté sans fin
dans une spirale descendante sans aucune aspérité 
qui m'engouffre malgré moi de plus en plus vite.

Je tourne et vire dans tous  les sens 
et mes repères basculent et disparaissent
dans un tourbillon effréné 
de rotations imprévues imprévisibles. 
Dans cet incroyable accélérateur de particules,
 tous les vents sifflent autour de moi 
ou plutôt de ce qu'il reste de moi
et dont je n'ai plus le temps d'être conscient. 
Une infinitude de mouvements descendants hélicoïdaux 
a succédé à une ultime digestion terrestre, 
comme une chute accélérée jusqu'au centre de la terre 
qui m'entraîne sans aucun contrôle de moi-même
et de là où je vais...

Me voici projeté brusquement
après cette descente sans fin 
dont j'ai cru que je ne réchapperais pas, 
dans une piscine souterraine immense, 
un temple liquide de grande étendue, 
qui est une salle soutenue par des piliers carrés 
répartis tous les dix mètres en un damier infini. 
je découvre que je peux me lever et marcher
sous un plafond très bas, 
dans une eau lustrale tranquille et tiède, à odeur de rose.

Mais je n'ai plus envie de bouger ni d'avancer du tout 
après avoir été digéré par la terre féconde
puis expulsé par la fureur de l'air
me voici enfin en repos aquatique immobile,
inerte et sans mouvement, 
proche de la dissolution d'un cristal de sel bientôt solubilisé 
et disparu dans l'océan inférieur de l'immensité souterraine 
qui me recueille maintenant.

Vais-je finir là mon dernier voyage si périlleux déjà ? 
La pénombre trouée d'ombres liquides
des piliers régulièrement espacés
 ne donne pas d'indication particulière
dans cette citerne mystérieuse d'eau de jouvence 
qui bientôt m'apaise, me conforte et me revigore. 

Des lueurs irisées apparaissent et tout au loin,
comme une porte de flamme s'ouvre.
 L'eau s'échauffe peu à peu à mi-corps 
tandis que je me suis remis en marche
vers cette ouverture rougeoyante 
et devient une sorte de boue légère et chaude 
qui semble me porter en avant
dans cette nouvelle aventure..
.
La porte ne semble pas se rapprocher de moi
si je n'accélère pas ma nage vers elle 
et comme je ne sais plus du tout où je suis et où je vais 
j'avance de plus en plus vite
de toute ma volonté ou de ce qu'il en reste.
"Qu'importe où je vais pourvu que j'y aille." 
Cette phrase qui monte en moi est mon nouveau mantra, 
c'est le chemin même que je fais qui me montre la voie..
.
Régénéré par l'eau lustrale j'avance sans plus aucune inquiétude 
ni peur ni crainte que j'ai laissées derrière moi. 
Je dois rejoindre la porte de flammes qui s'avance enfin vers moi 
et je m'y jette en courant. Je traverse la porte 
et tombe instantanément dans une cheminée ardente 
qui m'embrase entièrement.

Cette fois, je vais faire disparaître, 
bûche devenue brindille consumée jusqu'à la dernière étincelle.
J'accepte alors que telle soit ma destinée et que torche éphémère 
je doive disparaître dans ce puits de flammes écarlates. 
Je serai feu parmi le feu, flamme parmi les flammes, 
une raie lumineuse qui participe au rayonnement igné initial. 
Et je tombe sans fin dans le vide chatoyant 
d'un immense puits de flammes incandescentes...

Mais à ma grande surprise, je ne suis ni brûlé de partout 
ni encore moins consumé entièrement. 
Un sol blanc se rapproche de moi à toute allure 
et je vais bientôt m'y écraser, telle est ma fin. 
Le sol se rapproche à toute vitesse et je percute un tapis élastique
 qui me fait rebondir comme une goutte d'eau sur du mercure 
mais sans que je n'éclate en gerbe de gouttes d'eau disloquées en corolle.

 Je me roule en boule et les rebonds cessent 
jusqu'à ce que les mouvements d'arrivée au sol s'amortissent. 
Je me déplie, étonné d'être toujours vivant et vigoureux 
et j'explore le sol élastique
Devant moi se trouve une porte ronde
qui s'ouvre sur un vide blanc
rempli d'une froide lumière intense
qui m'attire inexorablement.
Ma fin est là, inexorable et tout ce qui précède 
n'était que prélude à me conduire là. 
Je n'ai plus qu'à sauter dans cette lumière blanc-bleu
et en finir.
  
Je prends mon élan, cours bientôt et plonge délibérément 
à travers l'ouverture ronde
comme on saute d'un tremplin élastique dans le vide
 en se livrant totalement à la gravitation. 
Je franchis d'un bond la porte blanche
et je découvre une corde d'or qui s'offre à moi 
que je saisis à deux mains et autour de laquelle je m'enroule.

Mes pieds se posent bientôt sur une coupelle,
sorte d'ombrelle renversée 
qui me permet de reposer tout mon corps debout 
centré autour de la corde verticale
qui oscille comme une balançoire sous moi. 
Lorsque les mouvements du pendule que je suis devenu
sont amortis et bientôt arrêtés, 
la corde s'élève et me voici qui monte
dans le puits de lumière blanche 
les pieds fixés sur la nacelle qui les soutient.

Dans cette cheminée cylindrique
le trou sans fond par lequel je suis arrivé 
semble s'éloigner et se refermer sous moi 
tandis que la corde d'or m'entraîne de plus en plus haut et loin 
de l'ouverture qui s'éloigne. 
Que va-t-il encore m'arriver ?...
Je lâche prise et bientôt la corde disparaît
car je n'en ai plus besoin. 
Tout mon corps aspire à sortir et à émerger
et je regarde en haut maintenant. 
Mes bras sont tendus et mes paumes de main sont réunies. 
Tout mon corps est une flèche dressée vers le haut 
et emporté dans une ascension magnifique.

Je franchis les limites de l'espace et du temps. 
Je découvre un soleil au-dessus de moi. 
La corde, la nacelle et la balançoire ont disparu totalement 
tandis que je continue de monter et que le soleil se rapproche. 
Ma tête devient bientôt lumineuse puis mon coeur et tout mon corps 
et puis enfin je disparais dans le soleil.

.
Rêve éveillé  de Pierre Etevenon
 le 8 décembre 1972, extrait du livre
"Des rêves pour changer votre vie"
.



2 commentaires:

  1. Un TRES BEAU rêve superbement illustré
    Merci

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    Réponses
    1. Merci Jackie...
      Oui, il y a dans ce rêve une sorte de "perfection", je trouve...tout y est...:-)

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