jeudi 30 juillet 2015

Interprétation du rêve par l'auteure

Jeudi 30 juillet 2015

Je retiens particulièrement ce rêve, parce qu'à mes yeux, 
outre qu'il est fort intéressant 
sur le chemin d'évolution de Marthe, individuellement, 
il m'a semblé qu'il pouvait aussi parler collectivement 
et décrire une dynamique des relations que peuvent entretenir 
le masculin et le féminin contemporain.
Dit autrement, ce rêve me paraît un grand rêve
Marthe rêve pour elle-même, 
mais en même temps rêve de, et pour, nous tous.

Son langage, contrairement aux règles de la logique formelle,
est pluri-signifiant, 
et peut délivrer des couches successives de significations 
qui ne s'excluent pas entre elles.

On peut le lire de manière freudienne, sur le plan de la sexualité personnelle, 
de manière jungienne, sur le plan de l'individuation de la rêveuse, 
et de manière plus vaste comme itinéraire spirituel et collectif 
de notre monde contemporain, voire comme Shéhérazade, universel...

D'entrée, d'ailleurs, le rêve nous y autorise
en décrivant la présence, sous leur maison, 
lieu de vie intérieure du moi et du couple,
d'un gouffre très grand et circulaire, 
d'un lac souterrain qui communique
avec une rivière également souterraine.

La cave de la maison est l'inconscient personnel 
et le gouffre et la rivière souterraine, l'inconscient collectif.
Ce qui arrive à chacun d'entre nous est en lien, le plus souvent à notre insu, 
avec les autres humains, des plus proches aux plus éloignés ; 
que nous le voulions ou pas,
nous sommes solidaires et sensibles les uns aux autres.

Le béton de la cave et du sous-sol 
(constructions de la culture, par opposition à la nature) 
n'empêche pas cette communication.
Le mur de pierres sèches, de technique ancienne, 
relie aussi le rêve aux savoir-faire et savoir-être traditionnels : 
nos anciens savaient déjà tout cela et l'honoraient 
et dans les grottes et les gouffres préhistoriques, 
les dessins pariétaux exprimaient déjà les liens d'admiration et de gratitude 
que nos ancêtres entretenaient avec la nature.

Marthe est attirée par le lac souterrain : l'âme collective, 
chassée par notre monde logique,
s'est retirée dans la partie obscure de notre esprit; 
le féminin, le maternel se sont réfugiés dans l'ombre, 
et la rivière de nos sentiments et de nos passions coule sous la terre, 
attendant patiemment le moment de sa résurgence !
Marthe, qui est une vraie femme, 
est attirée par le mystère de notre nature cachée. 
Quoi de plus naturel ?

Plonger dans les eaux souterraines signifie certes 
un retour aux eaux primordiales d'avant notre naissance, 
au monde à jamais perdu intra-utérin, 
et peut être lu comme un désir inconscient de régression ; 
cependant il m'apparaît qu'il est plus approprié, dans le cas de Marthe, 
de le lire comme une régression initiatique, un retour aux mystères 
des traditions des déesses-mères comme ceux d'Eleusis 
que notre monde chrétien a fait progressivement disparaître.

Mais à cette perspective, son mari, son homme, son masculin, 
n'est pas rassuré du tout !
Ce mari du rêve, quand on analyse les différents éléments en présence 
comme des parties internes de la psyché de Marthe, la lecture intra-psychique, 
est évidemment sa part masculine : sa raison raisonnable, son esprit, 
son intellect formé en France par l'Université lui disent de se méfier, 
de craindre cette attirance pour l'inconnu insondable de l'inconscient, 
cette "inquiètante étrangeté" comme le nommait Freud.

Le moi conscient et adapté à notre monde actuel,
 habitué à certains modes de pensée, bien normosé
arrivé au bord de cette eau sombre et insondable, 
frémit de peur et pense à la mort.
Il dit à Marthe : "Tu vas attraper la mort !". 
L'homme du rêve lui promet de grands dangers 
car il a peur de l'irrationnel, de l'insondable, de l'inconnu.

Oser retourner vers des initiations défendues par les autorités religieuses, 
c'est braver toutes sortes de menaces, culpabilités, châtiments, morts éternelles. 
Retourner vers le féminin primordial, n'est-ce pas dégénérer ?

Sans renier cette lecture intra-psychique, 
on peut aussi penser légitimement
que ce mari du rêve ressemble bigrement au vrai, 
que je connais bien, et qui est facilement impressionné 
par la puissance potentielle de son épouse.
Certes, Marthe projette son masculin sur son homme, 
mais l'inconscient ne projette pas n'importe comment, 
il choisit ses images avec une grande profondeur, 
il semble qu'il lise sans effort l'ombre de ceux qui nous entourent, 
et ce qu'il perçoit apparaît dans le rêve.

Bien que nécessitant prudence et réserve, 
une certaine lecture objective du rêve est possible.
Tout en parlant de l'évolution propre de Marthe, 
le songe parle en même temps de son couple, 
et de l'évolution collective possible dans notre monde 
des liens entre le féminin et le masculin, 
mais aussi entre l'homme et la femme.

Ce n'est pas "ou bien ou bien", c'est ET.

Nous sommes en ce cas autorisés
à comprendre les choses sur les trois plans
 -intrasubjectif, inter-subjectif et objectif - 
grâce à l'image qui suit, 
celle des deux voisins, le couple de petits vieux.

L'évolution possible des relations dans le couple,
au niveau collectif, 
est à mes yeux exprimée aussi par le songe, 
où l'on peut  partager une longue vie ensemble 
à condition de savoir encourager l'un pour l'autre 
le plein épanouissement des potentiels respectifs. 
Quand la petite vieille dame plonge, son époux l'encourage, 
et ainsi le gouffre disparaît sous la maison et la lumière grandit.

Marthe me précise que ces deux-là (les deux vieux) 
ne correspondent pas à des personnes qu'elle connaît. 
Ils sont donc à lire comme l'ombre du couple, 
ce qui est en potentiel
ce qui aspire à venir à la conscience pour y être intégré.

L'inconscient, je l'ai vu très souvent, se montre pédagogue pour le moi,
 et propose des possibilités en devenir : c'est là la dynamique du Soi.

Le Soi apparaît souvent dans les rêves,
 soit sous les traits d'un très jeune enfant 
qui a des caractéristiques étonnantes 
(par exemple, il parle couramment alors qu'il vient de naître), 
soit sous les traits de personnes très âgées, 
c'est-à-dire très sages.
L'évolution psychique réussie va vers une sagesse 
que bien des peuples traditionnels reconnaissaient à leurs anciens.

Notre monde actuel, qui a tant idolâtré la jeunesse, 
prisonnier inconscient d'un puer aeternus
l'enfant éternel parfait, tout-puissant et sans foi ni loi, 
a souvent oublié d'honorer la sagesse des Anciens ; 
à partir de cinquante ans, dans notre monde économique actuel, 
devenus has been, nous perdons notre valeur sur le marché du travail.
La vieillesse terrifie, on la cache...

La vision de l'âge comme un atout primordial sur le chemin de la sagesse, 
devenue rare, s'est retranchée dans l'inconscient, 
et s'exprime dans les rêves de nos contemporains.
Ce couple âgé, là où Marthe et son mari hésitent, n'hésite pas un instant ! 
La vieille femme, toute mince, en maillot de bain et bonnet de piscine,
 plonge sans crainte aucune, et son mari l'encourage ! 
Ils n'ont peur ni l'un ni l'autre.

Je trouve cette image particulièrement intéressante et originale : 
par les temps qui courent, des personnes âgées peuvent incarner cette audace 
et cette connaissance des territoires inconnus de la psyché 
(comme le Gandalf du Seigneur des Anneaux), 
notamment sous les traits des chamanes contemporains, 
hommes ou femmes.
Mais généralement ces figures hors norme, originales, 
vont seules,
surtout si ce sont des femmes.
On peut leur reconnaître des connaissances magiques, 
mais en ce cas, tels les prêtres ou religieux catholiques, 
ils sont célibataires.

Ici, c'est d'un couple qu'il s'agit, 
et la rêveuse est encouragée à trouver un chemin inédit, 
une compréhension personnelle de sa voie, 
tant spirituelle que dans sa vie de couple.
Elle est invitée à écouter son coeur, 
en n'hésitant pas à prendre des risques ; 
elle est sur un véritable chemin d'individuation.

Tant de formes de vie et de formes d'amour sont encore à inventer !

Paradoxalement, faire appel aux racines anciennes de notre psyché
à une certaine tradition, ne gèle pas les formes en conservant le connu,
 mais remet en mouvement l'éternelle inventivité de la vie.
Une tradition bien comprise ne stoppe pas l'évolution 
par un esprit de conservatisme, 
mais tout au contraire renoue avec son potentiel de création.
.
Lily Jattiot
"Sagesse du Féminin"
(p 184 à 188)
.
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mardi 28 juillet 2015

Rêve : "Le gouffre sous la maison"

Lundi 27 juillet 2015

Extrait du livre du livre
"Sagesse du Féminin" (2014)
de Lily Jattiot

Marthe est une belle femme d'une cinquantaine d'années quand elle vient me voir.
Elle a été prof de lettres, elle est mariée et mère de trois enfants.
Avec son mari, elle suit un enseignement spirituel depuis plusieurs années, 
sous la direction d'un maître indien, qui est sur une voie 
de la connaissance et de la conscience claire,
une voie d'esprit plutôt masculin.

Heureuse dans son couple, elle cherche néanmoins 
une manière qui lui soit propre de voir et de sentir les choses; 
elle ne souhaite pas rester dans un couple fusionnel, 
et même si elle préserve le lien, 
elle poursuit la voie de son individuation.
 
L'enseignement spirituel qu'elle reçoit, 
tout en lui convenant bien et en la nourrissant, 
demeure pour elle très masculin; 
il lui manque quelque chose. 
 
Elle avait déjà éprouvé ce sentiment lors de ses études en fac 
et dans sa profession au sein de l'éducation nationale. 
Se tournant vers un enseignement d'origine indienne, 
elle pensait combler cette faille 
mais n'y est toutefois pas tout à fait parvenue.




Voici son rêve :

J'habite dans une maison dont la cave communique
avec une grotte très profonde, pleine d'eau.
Les murs du sous-sol sont en béton, sauf un,
en belles pierres sèches avec un trou rectangulaire,
toujours ouvert, sans fenêtre, sur le gouffre.
Même en éclairant la cave, on ne peut que deviner
les parois rocheuses du gouffre, très grand et circulaire.

Je suis avec mon mari et je regarde le trou.
Je voudrais aller l'explorer à la nage mais il me dit que je suis folle :
je vais attraper la mort ou être aspirée par la rivière souterraine
qui alimente le lac de la grotte.

A la perpendiculaire de la fenêtre de notre cave,
il y a un autre trou rectangulaire identique
et un couple de petits vieux qui habite la maison mitoyenne.
La petite vieille toute mince, en maillot de bain de piscine,
bonnet et lunettes, monte sur le rebord de la fenêtre et,
encouragée par son mari, plonge.
On ne voit rien, on n'entend rien.
Mon mari me dit : "Tu vois, je te l'avais bien dit !"
Et moi, j'attends, persuadée qu'elle va revenir.

Je m'absente deux minutes et quand je reviens,
le gouffre est devenu une grande piscine naturelle
ornée de carreaux de couleurs,
qui a toujours la forme ronde et irrégulière du gouffre.

La lumière entre à flots
par une ouverture là-haut qui donne sur le ciel.
Il n'y a pas d'eau dans le bassin
et la petite vieille est rentrée chez elle à pied.
.

Rêve de Marthe
(p 183, 184)

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samedi 25 juillet 2015

Pas de voie sûre

Samedi 25 juillet 2015

Lorsqu'on suit la voie de l'individuation, lorsqu'on vit sa vie, 
il faut aussi prendre l'erreur à son compte, 
sans laquelle la vie ne serait pas complète. 
Rien ne nous garantit - à aucun instant - 
que nous ne tombons pas dans une erreur. 
On pense peut-être qu'il y a une voie sûre ; 
or, celle-ci serait la voie des morts. 
Alors, rien ne se produit plus, 
et en aucun cas ne se produit ce qui est juste. 
Qui suit la voie sûre est comme mort.

Ce n'est qu'après ma maladie que je compris 
combien il est important d'accepter son destin. 
Car ainsi il y a un moi qui ne flanche pas 
quand surgit l'incompréhensible. 
Un moi qui tient bon, qui supporte la vérité 
et qui est à la hauteur du monde et du destin. 
Alors, une défaite peut être en même temps victoire. 
Rien n'est troublé, ni au dedans ni au dehors, 
car notre propre continuité a résisté
au fleuve de la vie et du temps. 
Mais cela ne peut se produire que si notre prétention 
n'interdit pas au destin de manifester ses intentions.
.
C-G Jung
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vendredi 24 juillet 2015

La fonction prospective du rêve et ses limites

Vendredi 24 juillet 2015



Si le rêve ne joue pas pour Jung 
le rôle de gardien du sommeil que lui attribuait Freud, 
il n'en remplit pas moins une fonction compensatrice
Il transcrit en images "les pensées, penchants et tendances 
que la vie consciente ne met pas suffisamment en valeur", 
soit parce qu'ils ont été refoulés, 
ou parce qu'ils ne disposent pas d'une énergie, 
d'une clarté et d'une pertinence suffisantes.

Jung prenait comme exemple les rêves dérangeants 
qui "s'emparent avec évidence, et on ne peut plus mal à propos, 
des événements pénibles et des préoccupations de l'état de veille". 
Finissant souvent par provoquer le réveil, 
ils signifiaient pour Freud que la censure n'a pas réussi à codifier
 ou à réprimer leur émotion négative. 
Selon Jung, qui les comparait à la fièvre 
ou à la suppuration d'une blessure infectée, 
de tels rêves se "comportent comme des compensations 
de la situation consciente qui les a vus naître", 
ils constituent "l'expression de l'autorégulation psychologique de l'individu".

Leur aspect souvent incompréhensible oblige cependant 
à se demander quel profit le rêveur retirera de leur rôle compensateur. 
Jung faisait d'abord remarquer que 
"la compréhension n'est pas un phénomène purement intellectuel". 
Une infinité de choses incompréhensibles intellectuellement parlant, 
peuvent influencer, voire convaincre
et orienter l'homme de façon décisive". 
Ce constat le conduisait à attribuer aussi au rêve
une "fonction "prospective".


Voilà le grand retour du rêve, son véritable renouveau ! 
La pensée moderne réconciliée avec les traditions primitives et antiques 
débouchait enfin avec Jung sur une conception unitaire du psychisme.

Voyant dans la conscience et dans l'inconscient des forces 
"également susceptibles d'assumer une direction orientée vers une fin", 
Jung affirmait que la fonction prospective du rêve 
"se présente sous la forme d'une anticipation, 
surgissant dans l'inconscient, de l'activité consciente future. 
Elle évoque une ébauche préparatoire, une esquisse à grandes lignes, 
un projet de plan exécutoire. 
Son contenu symbolique renferme, à l'occasion,
la solution d'un conflit".

Parce qu'il a conservé "les traces de souvenirs inconscients, 
qui ne sont plus en état d'influencer efficacement la vie consciente, 
le rêve est donc souvent, au point de vue pronostic, 
dans une situation beaucoup plus favorable que le conscient".

Bien que le rôle quelque peu prémonitoire attribué au rêve 
ait fait de lui l'un des grands précurseurs de la pensée post-moderne 
(certains diront New Age), 
Jung ne fut pas pour autant un défenseur "allumé" de l'irrationalité.

Si le rêve ne sert pas toujours de masque aux désirs indicibles,
 il n'est pas non plus révélation divine. 
Pragmatique, la pensée de Jung lui venait 
d'abord de l'observation de ses patients, 
une attitude qu'il voulait scientifique 
et qui le conduisit à mettre en garde 
contre les dangers d'une surestimation 
de la fonction prospective du rêve. 

"On serait facilement tenté de voir dans le rêve 
une espèce de psychopompe qui, 
douée de sagesse supérieure, serait capable 
d'engager l'existence dans des voies infaillibles."
 Ce serait une erreur, 
car "bien souvent le rêve n'élargit la vie consciente 
que par la contribution de quelques fragments".

Pour la plupart des individus, 
conscience et inconscient vivent à peu près en harmonie, 
et le rêve joue surtout son rôle compensateur. 
Il devient prospectif pour avertir
lorsque la personne adopte une attitude inadaptée,
 source de souffrance et de déséquilibre.
Avec Jung, le rêve n'est plus seulement outil thérapeutique. 
Il est lui-même thérapie.
.
Sylvain Michelet-Roger Ripert-Nicolas Maillard
"Le livre des rêves"
.



jeudi 23 juillet 2015

Les rêves et l'avenir

Jeudi 23 juillet 2015


jung_freud

"Il est indubitable qu'il existe des choses comme les rêves prophétiques,
en ce sens que leur contenu donne une sorte de description de l'avenir ;
le seul problème est de savoir si ces prédictions coïncident
de manière significative avec ce qui arrive vraiment.
Je dois avouer, que, sur ce point,
mes résolutions en faveur de l'impartialité m'abandonnent.

Le rêve peut-il révéler l'avenir ?
Il n'en peut être question.
Il faudrait plutôt dire : le rêve révèle le passé.
Car c'est dans le passé qu'il a toutes ses racines.

Le rêve nous mène dans l'avenir
puisqu'il nous montre nos désirs réalisés ;
mais cet avenir, présent pour le rêveur est modelé,
par le désir indestructible, à l'image du passé."
.
S. Freud 
"L'interprétation des rêves"

.


Nous possédons en rêve 
une conscience de notre autre vie, 
qui se compose de toutes les choses 
que nous n'avons pas encore vécues.
.
C-G  Jung
.


Les rêves sont souvent des anticipations
qui perdent tout leur sens 
à être examinées d'un point de vue
purement causal.
.
C-G Jung  
"L'homme à la découverte de son âme" p 289
.

Les rêves [...] peuvent quelquefois
annoncer certaines situations
bien avant qu'elles ne se produisent.
Ce n'est pas nécessairement un miracle,
ou une prophétie.
Beaucoup de crises, dans notre vie,
ont une longue histoire inconsciente.
Nous nous acheminons vers elles pas à pas,
sans nous rendre compte du danger qui s'accumule.
Mais ce qui échappe à notre conscience
est souvent perçu par notre inconscient,
qui peut nous transmettre l'information
au moyen du rêve.
.
C-G Jung
"L'homme et ses symboles"
.

La fonction prospective du rêve se présente
sous la forme d'une anticipation, 
surgissant dans l'inconscient,
de l'activité consciente future ; 
elle évoque une ébauche préparatoire,
une esquisse à grandes lignes, 
un projet de plan exécutoire.

Son contenu symbolique renferme, à l'occasion,
la solution d'un conflit (...) 
La réalité des rêves prospectifs de cette nature
est indéniable. 
Il serait injustifié de les qualifier de prophétiques, 
car ils le sont, au fond, tout aussi peu 
qu'un pronostic médical ou météorologique.
.
C-G Jung
.

Par le canal des rêves, le Soi se manifeste
en guidant progressivement le rêveur
dans le dénouement des problèmes
de sa vie quotidienne, et,
au travers de ce cheminement
qui lui est éminemment personnel,
il le conduit progressivement
vers la réalisation de son individuation,
vers l'ouverture à une vraie présence,
une vraie participation avec les autres
à l'Univers.
.
Pierre Trigano et Agnès Vincent
"Le Sel des rêves"
.


mercredi 22 juillet 2015

Le rêve selon Jung : Un point de vue finaliste

Mercredi 22 juillet 2015



LE RÊVE SELON JUNG

On présente souvent Jung comme un dissident du mouvement freudien
mais sa pensée profondément originale
n'emprunta que certains concepts au freudisme.

Refusant de faire de la libido (en latin: désir)
l'unique moteur énergétique de l'activité inconsciente,
et d'une sexualité érigée en dogme le seul objet de ses motivations,
 il aboutit à une conception du rêve 
beaucoup plus large que le modèle freudien.

Selon Jung, le processus de civilisation a provoqué une séparation
entre conscience et instincts fondamentaux.
Ceux-ci se sont réfugiés dans l'inconscient
et s'expriment sous la forme symbolique des images oniriques.
 "Il faut que la conscience et l'inconscient soient intégralement reliés
afin d'évoluer parallèlement, écrivit-il dans "L'homme et ses symboles".

S'ils sont coupés l'un de l'autre, ou "dissociés", il en résulte des troubles psychologiques.
A cet égard les symboles de nos rêves sont les messagers indispensables
qui transmettent les informations de la partie instinctive
à la partie rationnelle de l'esprit humain,
et leur interprétation enrichit la pauvreté de la conscience,
en sorte qu'elle apprend à comprendre de nouveau le langage oublié des instincts."

Le rêve n'est plus l'écume des désirs infantiles débordant d'un inconscient refoulé,
mais un messager faisant pont entre les deux éléments constitutifs de la psyché.

"Le rêve, dérivant de l'activité de l'inconscient, donne une représentation,
 non pas de tous les contenus qui y figurent,
mais seulement de certains d'entre eux qui,
 par voie d'association, s'actualisent, se cristallisent et se sélectionnent,
en corrélation avec l'état momentané de la conscience," écrivait Jung
dans "L'homme à la recherche de son âme".

Si le rêve fait appel aux souvenirs enfantins,
ce n'est pas parce qu'il repose sur des désirs censurés que le présent ravive,
mais pour exprimer des instincts dont les formes de pensée sont primitives,
voire archaïques, quoique toujours présentes dans l'inconscient.

A la pensée de Freud, reflet de la physique mécaniste du XIXème siècle,
Jung opposa une vision que l'on peut qualifier de quantique.

"Le déterminisme causal tend, estimait-il, vers une réduction univoque,
vers une codification des symboles et de leurs sens.
Le point de vue finaliste, au contraire,
voit dans les variations des images oniriques
le reflet de situations psychologiques infiniment variées."

"Le rêve dit ce qu'il est", ne cessait de répéter Jung.
Tous les objets longs ne sont pas des phallus.
Rêver d'une clé n'équivaut pas à rêver d'un sabre.
Tout rêve possède son sens propre. Il a surtout un but.

"La façon de voir finaliste, que j'oppose à la conception freudienne,
ne signifie pas une négation des causes du rêve,
mais elle n'en conduit pas moins
à une toute autre interprétation de ses matériaux associatifs.

Les faits en eux-mêmes, à savoir les associations, demeurent inchangés,
mais on les confronte avec une autre unité de mesure.
Posons-nous le problème de façon toute simple et demandons-nous
à quoi sert, à quoi rime le songe, que doit-il susciter ?"
.


Sylvain Michelet - Roger Ripert- Nicolas Maillard
"Le livre des rêves"
.


lundi 20 juillet 2015

L' Avenir qui nous tire...


Lundi 20 juillet 2015

image ici


Et nous touchons ici  l'erreur fondamentale de notre psychologie. 
Elle est incapable de comprendre 
parce que c'est en bas qu'elle cherche, 
dans le passé évolutionnaire.

Certes, une moitié du Secret est là, 
mais c'est la force d'en haut qui ouvre la porte d'en bas. 
Nous ne sommes pas faits pour regarder toujours derrière nous, 
mais en avant et en haut dans la lumière supraconsciente, 
parce que c'est notre avenir 
et que seul l'avenir explique et guérit le passé :

Je trouve difficile,
écrivait encore Sri Aurobindo à un disciple, 
de prendre ces psychanalystes au sérieux, 
encore que je le devrais peut-être, 
car la demi-connaissance est chose puissante 
et souvent elle est un grand obstacle 
à l'émergence de la vraie Vérité....
Ils regardent de bas en haut et veulent expliquer 
les lumières supérieures par les obscurités inférieures, 
mais le fondement des choses est en haut, non en bas.

C'est le Supraconscient, non le subconscient, qui est le vrai fondement. 
Ce n'est pas en analysant les secrets de la boue où il pousse, 
qu'on explique le lotus; 
le secret du lotus est dans l'archétype divin du lotus, 
qui fleurit à jamais en haut, dans la lumière.

Nous avons l'air de progresser de bas en haut, 
ou du passé vers l'avenir, ou de la nuit vers la lumière consciente, 
mais c'est là notre petite vision momentanée, 
qui nous coupe la totalité du tableau, 
sinon nous verrions que c'est l'avenir qui nous tire,
 non le passé qui nous pousse,
 et la lumière d'en haut qui peu à peu entre dans notre nuit 
- où donc la nuit pourrait-elle jamais créer toute cette lumière ? 
si nous étions partis de la nuit, nous n'aboutirions qu'à la nuit.

"L'arbre éternel a ses racines en haut
et plonge vers le bas ses branches",
 dit la Katha Oupanishad.


Nous avons l'impression de faire de grands efforts de croissance
pour comprendre et connaître, et d'une tension vers l'avenir; 
mais c'est notre petit point de vue ; 
il y a peut-être un autre point de vue 
d'où nous verrions cet Avenir supraconscient
 qui pousse pour entrer dans notre présent.

Et nous verrions peut-être que nos grands efforts étaient 
seulement la résistance de notre épaisseur et de notre obscurité.

L'avenir ne va pas seulement de bas en haut, 
sinon il n'y aurait pas d'espoir pour la terre, 
elle finirait par éclater en plein ciel 
dans une suprême tension psychique, 
ou par retomber dans la nuit ; 
il va de haut en bas ;
il descend de plus en plus dans notre brouillard mental, 
nos confusions vitales, dans la nuit subconsciente et inconsciente, 
jusqu'à ce qu'il ait tout éclairé, tout révélé, tout guéri -
et finalement tout accompli. 
.
Satprem
.


dimanche 19 juillet 2015

Le symbole du cheval

Dimanche 19 juillet 2015



 
Le cheval représente le corps physique, 
ce corps animal que nous habitons, 
que le mental ne doit pas chercher à dominer, 
mais plutôt à comprendre, pour pouvoir faire corps avec lui. 
Le cheval appartient à la terre. 
Son corps est en total accord avec tous les éléments. 
Il en tire sa puissance et son énergie. 
Le cheval est le symbole de la plénitude des sens physiques, 
l’acceptation totale de son corps. 
Il n’y a cependant pas de connotation sexuelle 
dans l’image du cheval.

Le regard que nous avons sur notre corps 
est presque toujours un regard extérieur. 
C’est pour cela que nous sommes le plus souvent 
spectateur face à des chevaux qui évoluent. 
L’image du cavalier est plus rare. 
Se voir chevaucher avec grâce et élégance, 
au pas comme dans le galop le plus effréné, 
faire corps avec l’animal, est le signe d’un mariage parfait
 du corps et de l’esprit, de la force et de la sagesse. 
C’est l’image mythologique du centaure. 


Si un cheval nous désarçonne, se dérobe, 
c’est le signe que nous sommes trop civilisés, 
que nous avons rompu avec notre nature première. 
Nous ne sommes plus à l’écoute de notre corps 
et de ses réels besoins. 
Nous le jugeons comme quantité négligeable. 
Une personne qui s’enfuit sur un cheval exprime le désir qu’elle a 
de retourner à sa véritable nature, une liberté physique. 
Elle n’a pas envie de se laisser apprivoiser.

Le cheval symbolise encore les élans, les pulsions vitales. 
C’est le véhicule de nos déplacements terrestres.
Tristan Moir
"Dictionnaire psychanalytique
des images et des symboles du rêve"
 
 


Nous savons que le cheval symbolise la liberté des élans
la pulsion de vie qui fuse pour que s'accomplisse notre Destin individuel.

Les juments peuvent à priori désigner aussi bien les pulsions du corps, 
la force des émotions, la vivacité des pensées ou les élans spirituels 
puisque ce sont des animaux psychopompes 
L'énergie du cheval symbolique appartient à tous les mondes 
et dynamise les multiples accords de la nature humaine.

De l'animal sauvage au cheval ailé 
en passant par la bête domestiquée, 
nous avons une série d"images
qui illustrent les différents niveaux 
de contrôle de la conscience
sur les forces vives qui animent toute personne.

Ces forces sont-elles instinctives et indomptées
Alors l'image du fougueux animal s'imposera.  
Sont-elles mises au service d'un idéal d'élévation
Alors Pégase fera son apparition
dans le firmament du monde imaginal.
Sont-elles encore contenues et forcées par l'éducation,
 la culture ou la pression sociale ? 
Alors le lourd cheval caparaçonné et harnaché
entre en scène.

.
Luc Bigé
"La voie du héros" 
(Les douze travaux d'Hercule)
.

...la nuit, quand le cavalier devient aveugle,
le cheval peut se faire "voyant" et guide;
c'est alors lui qui commande,
car lui seul peut franchir impunément
les portes du mystère inaccessible à la raison.
(...)
Coursier et cavalier sont intimement unis.
Le cheval instruit l'homme,
c'est-à-dire que l'intuition éclaire la raison.
Le cheval enseigne les secrets,
il se dirige de façon juste.
(...)
Chtonien à l'origine,
le cheval devient peu à peu
solaire et ouranien.
(...)
Au terme de cette ascension,
domine la figure du blanc cheval de majesté,
monture des héros, des Saints
et des conquérants spirituels.
.
Jean Chevalier et Alain Gheerbrant
"Dictionnaire des symboles"
.


...Le cheval blanc se retrouve,
dans de nombreux mythes,
associé à la mort.

Dans la majeure partie des rêves,
cet animal n'annonce pas un décès,
mais une profonde transformation de l'être.
.
Hélène Renard
"Dictionnaire des rêves"
.




samedi 18 juillet 2015

Grand rêve : "Libération"

Samedi 18 juillet 2015



J'avais vingt ans tout juste lorsque je suis entré dans les camps de la mort 
- j'en suis sorti comme un mort, vivant quand même.
(...)
Par un de ces "hasards" miraculeux -et alors là on touche le fil du Destin, 
mais un fil si loin et si profond qu'il est comme un autre abîme, 
onze mois exactement après la sortie de cet Enfer, 
j'ai été conduit devant Sri Aurobindo et Mère à Pondichéry.
(...)
Par un autre "hasard", peu de temps après, 
je tombe sur un disciple qui me dit : 
"Vous savez, les "rêves", ça a un sens."
Un sens ?...Tout était si insensé
que je me fichais de tout ou que j'étais prêt à tout. 

Tout, mais pas ça que je vivais ou survivais.
J'étais le restant d'un anthropoïde occidental 
complètement matérialiste, et surtout anti-religieux - 
je détestais les religions et les dogmes de toutes sortes, 
ce Dieu de la mort, quoi ?
Alors, ce soir-là, je me suis dit : "Bon, voyons ce que c'est." 
Je voulais toujours voir les choses à nu et sans masque 
- les masques étaient tombés une fois pour toutes 
devant certaines piles de cadavres torturés. 

Et voici ce que j'ai vu cette nuit-là :



J'étais dans une citadelle moyenâgeuse assez sombre 
-une citadelle occidentale, c'était en Occident - 
et je descendais une ruelle étroite pavée d'énormes dalles.

Je les vois encore, solides polies, inégales, 
et de hauts murs qui avaient l'air de pencher sur moi
 avec de petits balcons en fer forgé. Je marchais là, tout petit, 
au milieu d'une foule obscure et étrangère. 
C'était cette foule qui avait une odeur. 
Une foule étrangement silencieuse : 
chaque être était tapi dans le silence. 
Et une odeur de souterrain.



Je me voyais au milieu d'eux, très petit, presque sombre, 
comme vu par-dessus mes épaules.
J'allais vers une porte, je savais qu'il y avait une porte en bas. 
Mais à mesure que j'avançais, j'avais le sentiment 
que je n'étais pas habillé comme il fallait, 
que je ne faisais pas ce qu'il fallait, 
que je n'étais pas comme eux, 
que j'étais d'un autre lieu ou d'un autre temps, peut-être, 
une sorte d'intrus, et que l'on me regardait. 

Et ces regards-là devenaient de plus en plus menaçants, agressifs. 
Et plus je sentais monter mon étrangeté, plus leur hostilité montait. 
Elle montait de partout, même des murs, des pierres - 
un monde de pierre . 
Et je ne savais pas ce qu'il fallait faire ; 
je cherchais désespérément le geste, la parole : 
je me courbais, je rasais les murs, je m'emplissais de gris 
- rien ne servait.



J'étais repéré par cette foule muette. 
Et mon malaise grandissait, devenait presque intolérable, étouffant, 
comme si mes vêtements étaient faux, odieusement faux, 
mon visage aussi, ma couleur - 
j'étais pris dans une espèce de gnome-moi, qui était moi quand même, 
et je n'arrivais pas à trouver quelque chose qui m'aille, 
je n'arrivais pas à faire comme eux, 
je ne savais pas le mot, je ne savais pas les gestes, tout pesait. 
Et puis les policiers allaient venir, c'est sûr 
et je n'avais pas de passeport non plus, 
je n'avais rien, j'étais enfermé,
 prisonnier dans cette horrible forteresse de pierre...


Et, soudain, jailli je ne sais d'où, au milieu de la ruelle, 
un énorme cheval blanc est apparu -blanc, lumineux, 
oh ! un animal merveilleux et haut, si haut 
qu'il touchait presque les murs et dominait la foule. 
Un poitrail gigantesque, formidable. 
Et avant même que j'aie pu comprendre ce qui se passait, 
je me suis retrouvé sur son dos, galopant : 
un galop fantastique. 
Un galop de dieu, tout s'ouvrait devant moi : 
la foule, les portes, les gardes, rien ne résistait. 
Et puis le large tout d'un coup, la liberté, l'air pur 
- tous les rhododendrons de l'Himalaya dans un souffle. 
J'en avais plein les poumons, 
je me dilatais, m'élargissais, m'allumais presque
 - je reprenais ma taille et ma couleur. 
Une libération.





Je sens encore cette crinière blanche dans mes mains, 
les flancs chauds contre mes cuisses, 
et puis le vent qui cingle ma figure, 
l'allégresse dans mes veines. 
Emporté par une puissance triomphante, irrésistible...
Nous entrions dans une forêt. 
.

C'était en 1946. 
C'était l'annonce de tout ce qui allait suivre. 
Ma première vision
Mais ce que je ne comprenais pas alors, 
c'est que cette citadelle moyenâgeuse représentait 
non seulement le Moyen-Age (religieux) du XIème siècle, 
mais le Moyen-Age (scientifique) du XXème siècle. 
C'est-à-dire tout l'Occident.
Et je galopais comme un fou 
sur le dos de ce formidable cheval blanc...
.
Satprem
(Chapitre : Le fil du destin)




mercredi 15 juillet 2015

La solution est à l'intérieur

Mercredi 15 juillet 2015




Il est très possible que nous regardions le monde dans le mauvais sens,
et que nous puissions trouver la bonne réponse
en modifiant notre approche et en l'abordant de l'autre côté,
à savoir non plus de l'extérieur, mais par l'intérieur.
.

La réflexion personnelle sur soi, le retour de l'individu 
aux fondements de la nature humaine, à son être profond 
dans sa destinée individuelle et sociale, 
voilà le moyen de lutter contre l'aveuglement 
qui règne à l'heure actuelle.
.

Quand je conseille à mes patients : "Prêtez attention à vos rêves", 
j'entends par là : "Revenez à ce qu'il y a de plus subjectif en vous, 
à la source de votre existence et de votre vie, 
à ce point où vous participez, à votre insu, à l'histoire du monde.
L'obstacle, d'apparence insurmontable, 
auquel vous vous heurtez doit être effectivement une difficulté insoluble, 
afin que vous ne continuiez pas à vous perdre 
dans la recherche de remèdes dont l'inefficacité est démontrée d'avance. 
Vos rêves sont l'expression de votre nature subjective; 
c'est pourquoi ils peuvent vous révéler par quelle erreur d'attitude 
vous vous êtes fourvoyé dans une impasse."
.

A côté de vérités rationnelles, il en est qui sont irrationnelles.
Ce qui, dans les choses humaines,
semble impossible par la voie de l'intellect,
s'est souvent avéré possible par la voie de l'irrationnel.

En fait les grandes transformations de l'humanité
ne se sont pas toujours accomplies par la voie du calcul intellectuel,
mais bien par des voies qui échappaient à l'homme contemporain,
qu'il écartait comme insensées
et dont on n'a compris la nécessité interne que beaucoup plus tard.

Le plus souvent, on ne les démêle pas du tout,
car les lois les plus importantes de l'évolution de l'esprit humain
demeurent encore pour nous lettre morte.
.

Le développement de l'art moderne, 
avec ses tendances d'apparence nihiliste à la décomposition, 
doit être compris comme un symptôme et un symbole 
de cette atmosphère de fin et de renouvellement du monde
qui est caractéristique de notre époque. 
Cet esprit se fait partout sentir, dans la vie politique, sociale, 
aussi bien que philosophique.
Nous vivons précisément à l'époque de la "Métamorphose des Dieux", 
c'est-à-dire de la métamorphose des principes et des symboles de base. 

Cette tâche, ces aspirations de notre temps, 
qui peuvent sembler écrasantes, 
et qu'en vérité nous n'avons pas choisies nous-mêmes consciemment, 
constituent l'expression de  la métamorphose intérieure
 qui se produit dans l'homme inconscient.

Ces transformations auront les conséquences les plus lourdes 
et les générations à venir se devront d'en faire le bilan, 
si l'humanité veut se sauver de l'auto-destruction 
dont la puissance de sa technique et de sa science la menace.
.

Nous vivons dans une époque de confusion et de désintégration.
 Tout est devenu problématique.
Comme toujours dans les cas de ce genre,
des contenus inconscients se pressent aux frontières de la conscience,
dans le but de compenser la situation périlleuse où se trouve celle-ci.

 C'est pourquoi tous les phénomènes qui se produisent dans la zone frontière
méritent d'être examinés soigneusement, si obscurs qu'ils puissent paraître,
pour y découvrir les germes d'éventuels arrangements nouveaux.
.

C-G Jung
(Citations tirées de divers ouvrages)
.

lundi 13 juillet 2015

Rêve de Jung : La petite flamme

Lundi 13 juillet 2015
 


 
 
À cette époque, j’eus un rêve inoubliable 
qui m’effraya et m’encouragea en même temps.

C’était la nuit, à un endroit inconnu; 
je n’avançais qu’avec peine
contre un vent puissant soufflant en tempête.
 En outre il régnait un épais brouillard.

Je tenais et protégeais de mes deux mains une petite lumière 
qui menaçait à tout instant de s’éteindre. 
Or il fallait à tout prix que je maintienne cette petite flamme :
 tout en dépendait. 

Soudain j’eus le sentiment d’être suivi ; 
je regardai en arrière et perçus 
une gigantesque forme noire qui avançait derrière moi. 
Mais, au même moment, j’avais conscience que
 — malgré ma terreur — 
sans me soucier de tous les dangers, 
Je devais sauver ma petite flamme à travers nuit et tempête.
 




 
Quand je me réveillai, je compris immédiatement : 
c'est le "Fantôme du Brocken", mon ombre même 
projetée sur les traînées de brouillard, 
par la petite lumière que je portais devant moi.

Je savais aussi que cette petite flamme,
c'était ma conscience. 
C'était la seule lumière que je possédais. 
Ma connaissance propre était l'unique 
et le plus grand trésor que je possède. 

Il était certes infiniment petit et infiniment fragile 
comparé aux puissances de l'ombre. 
Mais c'était tout de même une lumière, ma seule lumière.
.
 
C-G Jung
"Ma vie" Chapitre III
 
.


 


mercredi 8 juillet 2015

Le grand danger et le salut

Mercredi 8 juillet 2015




Extrait de "La conjonction des savoirs" de Dominique Casterman :


"On suppose en général que les complexes ne sont pas normaux, 
alors que ce sont des nécessités vitales ; 
 le moi, le complexe du moi en est un exemple. 
Le moi est un complexe qui dispose d'énergie, 
qui est autonome et qui se sent libre (c-à-d déterminé)..."




"Qu'est ce complexe du moi
C'est un amoncellement de contenus
imbriqués les uns dans les autres, 
doués chacun d'un potentiel énergétique, 
et centrés de façon émotionnelle autour du précieux moi.
Car le moi a un effet puissamment attractif 
sur toutes sortes de représentations. 
Il peut même à lui seul occuper toute la conscience. 
On accède ainsi à une conscience de soi exclusive, 
mesquine et pénible, qui s'épuise dans la préoccupation 
et la perception de son comportement extérieur : 
on est possédé par son propre moi..."


Mais il existe une différence primordiale   
entre les complexes en général et celui du moi en particulier :
le moi est doué de conscience.
Il peut de la sorte faire retour sur lui-même et se concevoir lui-même,
 alors que les autres complexes ne paraissent témoigner d'aucune conscience. 
Il est fort difficile d'ailleurs, pour ne pas dire impossible, 
de préciser si les complexes ont ou n'ont pas conscience d'eux-mêmes. 
Il est fréquent que quelqu'un se livre à une action 
dont on pense qu'il l'accomplit consciemment, 
alors qu'elle a lieu à son insu. 
Cela est plus fréquent qu'on ne le croit."

C-G Jung "A la découverte de son âme"



Jung a remarquablement saisi cette situation intérieure 
qui place le moi dans un état pathologique de possession et motive, 
tant individuellement que collectivement, 
les plus grandes misères humaines.

Pourtant, il a vu aussi que l'inconscient profond, 
sous certaines conditions, et surtout celle de
la sauvegarde de la lumièr
de la conscience individuelle,
pouvait être à la source
  des réalisations spirituelles 
les plus authentiques.


"Les thèmes archétypiques peuvent éblouir et fasciner 
aussi bien que créer des valeurs culturelles ; 
ils peuvent conduire aussi bien au massacre fondé sur l'idéologie
 ou la folie collective qu'à des réalisations spirituelles.


Le problème est ici de savoir si l'individu
saura conserver intact son moi conscient 
ou s'il succombera à l'énorme charge émotionnelle 
que possèdent toutes les représentations archétypiques, 
provoquant la désintégration partielle ou totale 
de son moi conscient.


Les guerres de religion, les luttes 
et les persécutions idéologiques d'hier et d'aujourd'hui
 révèlent d'une façon impressionnante à quel point 
l'humanité demeure sujette aux états de possession.


Jung a montré que la plupart des maladies mentales graves
 consistent en ce que le conscient est bousculé 
par des contenus archétypiques qu'il ne peut pas intégrer  
à la suite d'une certaine faiblesse. 
Plus le conscient est étroit, rationaliste et rigide,
 plus le danger est grand.

Le contenu archétypique constellé
 dans de telles situations individuelles ou collectives
 est à la fois le grand danger et le salut,
 car chaque fois qu'un tel élément s'éveille 
et exerce sa pression à partir de l'inconscient,
 c'est que son apparition est indispensable
 pour compenser une unilatéralité du conscient.

Toutefois, c'est seulement dans et par l'individu 
qu'il peut être reconnu et intégré."

Marie-Louise Von Franz 
"Jung, son mythe en notre temps"