vendredi 20 mars 2015

Cycles du temps et transformation de l'être

Vendredi 20 mars 2015

Le printemps




(...) Le fil du déroulement temporel nous conduit maintenant vers le printemps qui, on le verra, inaugure un renouveau salvateur après les étapes mortelles de l'automne et de l'hiver.

 L'aspect cyclique du temps prend toute sa valeur avec la remontée de la lumière, la réapparition de la végétation, le retour à la vie de ce qui semblait mort. Cet aspect cyclique fonde l'expérience qualitative du temps que les hommes ont pu éprouver depuis l'apparition de la conscience.

Elle dément l'autre expérience du déroulement temporel, celle d'un temps inexorable, flèche tirée d'un moment inconnu du passé vers un avenir inconnaissable; cette flèche-là conduit l'homme de sa naissance à sa mort -"fugit irreparabile tempus".

Mais le temps cyclique annuel est là pour toujours démentir l'angoisse du temps inexorable.
A chaque printemps, l'être humain, contemplant la végétation renaissante s'imprègne de la sensation d'un renouveau auquel il s'identifie.
C'est lui qui renaît avec le printemps. Le voilà qui espère de nouveau, qui retrouve un élan de jeunesse, des souvenirs d'autres printemps. C'est enfin la belle saison qui s'annonce et ce retour à la vie apparaît comme une fête : fête des fleurs, du mai, de l'espoir, espoir de guérison...

La nature se guérit, comme spontanément, de sa maladie mortelle de l'hiver. Cette mort n'était donc qu'apparente et la vie, toujours présente, couvait dans le secret ; l'éclosion que chacun attendait se prépare, l'espoir de renouveau fait vivre, permet de traverser les périodes sombres, comme l'espoir de guérison soutient le malade.


Qu'est-ce que la guérison ? En termes médicaux, nous dirons que c'est le retour à l'état de santé antérieur. cette définition n'est pas tout à fait exacte car il est bien rare, en effet, que le malade retrouve l'état de santé antérieur sans modification. Au sortir d'une maladie, la personne qui vient de la subir est changée.
Elle a acquis parfois une immunité qui la défendra à tout jamais  d'une nouvelle attaque; elle peut aussi garder des traces, des séquelles, graves ou légères du mal dont elle a été atteinte ou voir la maladie aiguë se transformer en atteinte chronique qui repousse dans le futur l'espoir de guérison.

Est-ce à dire que l'idée même de guérison est illusoire ? Certainement pas, mais il faut souligner que la guérison définit plus un nouvel état de viabilité qu'un simple retour à l'état antérieur. Elle est d'abord et avant tout une victoire sur la mort qui a été déjouée pour cette fois ; elle est ensuite une transformation physique et psychique de la personne qui vient de subir la maladie. A partir de cette transformation, un nouveau cycle vital peut s'amorcer.

Ce qui est vrai pour la médecine du corps l'est encore plus pour la médecine de l'esprit.La guérison en psychologie ne s'avère jamais être un retour à l'état de santé antérieur, mais l'apparition d'un état nouveau qui permettra une saisie différente du problème vital.

C'est si vrai que toutes les attitudes qui cherchent à restaurer le passé tel quel sont vouées à l'échec, essais de régression vers un statu quo dont on garde une nostalgie inguérissable, éternel retour en arrière dans des souvenirs entretenus, incapacité de tourner la page.



Guérir, pourrait-on dire, c'est changer; c'est regarder son passé d'un oeil nouveau, son avenir dans une autre perspective.

 Mais comment changer sans détruire les attitudes de pensée qui, jusque-là, ont soutenu la conduite ? Et comment les détruire parfois, si ce n'est par une violence intérieure qui contraigne à la transformation, par une révolution interne qui amène à une transformation radicale ?

 Si, guérir c'est renaître, il faut pour cette résurrection une mutation profonde. On comprend qu'il a fallu ainsi passer par la déchirure de l'automne et la stase de l'hiver : la mort n'était intervenue là que pour modifier les structures vieillies. Elle s'efface maintenant devant la pulsion vitale qui veut réapparaître : le printemps est là. Le feu qui couvait sous la cendre va briller à nouveau.


Cette "guérison" est donc une transformation en profondeur de l'être qui a subi les interrogations mortelles; c'est un réveil de la vie qui va infuser dans de nouvelles structures psychiques, élaborées pendant l'ombre de l'automne et la stase de l'hiver.

Le temps, on le voit, s'introduit comme une nécessité dans toute évolution psychologique ;

il est le cadre d'un processus psychique qui conduit la personne vers un état nouveau que Jung a appelé "processus d'individuation", indiquant par là que le mouvement vital poursuit son but : celui d'une personnalité réunifiée.

Marie-Claire Dolghin
"Les saisons de l'âme"

Emerveillement devant la magie de la "résurrection" printanière :





P-S : En Egypte, c'était Osiris le "reverdissant" qui était le dieu de la croissance végétale...



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